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Le conflit sécurité/liberté entre l’humain et le chien, au cœur du bien être canin

Le bien être canin est défini comme l’état physique et mental du chien qui découle de la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux et de ses capacités à s’adapter à son milieu (Fraser et Broom, 1997, 2008).

Avant d’aller plus loin, connaissez-vous les besoins physiologiques de votre chien ?

Les plus évidents sont :

  • Respirer !
  • Manger et boire (c’est vous qui choisissez quoi, quand et comment il s’alimente)
  • Se reproduire (c’est vous qui contrôler cette activité, bien souvent par la stérilisation/castration de l’individu)
  • Dormir (là encore c’est l’humain qui choisit pour le chien où et quand il peut se reposer)

PS : Juste après les besoins physiologiques s’ajoute le besoin de sécurité (environnement stable, rassurant, sans anxiété…) : encore un point crucial qui dépend de vous.

Si vous souhaitez en savoir plus je vous renvoie vers notre article « La pyramide de MASLOW ou pyramide des besoins du chien ».

Maintenant, connaissez vous les besoins comportementaux de votre chien ?

  • Une activité physique régulière
  • Une possibilité d’exploration de l’environnement, assurant une dépense physique et l’utilisation de leur sens de prédilection : le flair
  • Des stimulations cognitives (jeux, exploration, entraînement…)
  • Des interactions sociales inter et intraspécifiques

A la lecture de ces informations, vous comprendrez, encore et encore, que l’élément par lequel le chien pourra assouvir ses besoins physiologiques mais aussi comportementaux, est son humain. Sans lui, enfermé dans un appartement ou laissé à l’abandon dans le jardin de la maison, votre compagnon souffrira de ne pouvoir s’épanouir par l’expression de ces comportements naturels et indispensables.

Or, de part notre mode de vie en société, les espèces domestiques comme le chien, vivent principalement en captivité. Dans un environnement ressemblant parfois à une cage dorée. De part les obligations législatives en vigueur (loi interdisant la divagation, lieux publics interdits aux chiens…) et par l’attachement que nous éprouvons vis-à-vis de notre chien, nous nous donnons le devoir de le garder sous contrôle pour sa sécurité et celle des autres.

Pourtant, la problématique de leur bien être préoccupe de plus en plus les éthologues, les professionnels du monde canin et aussi les particuliers.

Alors que faire pour assurer le bien être canin ?

Mes expériences personnelles et professionnelles m’ont démontré un élément crucial lorsque l’on vise une éducation positive bienveillante : le choix. Le chien doit avoir le choix, de faire ou de ne pas faire.

Certes, ca ne sera pas toujours le cas, car on ne peut pas tout contrôler, mais il est primordial de garder ce principe en tête. Et d’offrir le choix à votre compagnon, le plus souvent possible.

Pourquoi ?

Car « Être en bien être, être « heureux », c’est avoir le choix. » Attention aux extrêmes cependant ; ce n’est pas non plus tout avoir forcément, sans jamais connaître de frustration, ce n’est pas ne jamais avoir de stress.

Nb: Le stress fait partie des mécanismes physiologiques de l’organisme, et il n’est pas toujours négatif. L’important étant que l’individu retrouve un état d’équilibre (émotionnel) après une exposition à un déclencheur stressant.

Comment cela peut se traduire concrètement dans votre quotidien avec votre chien ?

Vous devez être force de proposition pour votre compagnon, et en bon leader vous devez veiller sur votre protégé tout en lui laissant l’opportunité de faire selon ses envies :

  • Laissez lui le temps de renifler une odeur au sol
  • Laissez lui le choix du trajet de la balade, des temps d’arrêt
  • Respectez son refus, lorsqu’il n’a pas envie de faire la session d’entraînement que vous aviez prévu
  • Voyez et entendez lorsqu’il ne souhaite pas être caresser et manipuler par quelqu’un
  • Ne l’obligez pas à aller jouer avec un congénère qui l’effraie

Les exemples sont multiples. Et toutes ses bonnes actions que vous allez saupoudrer tout au long de l’éducation de votre chien vont le faire gagner en confiance, en lui, en vous, et le binôme que vous formez.

Cela ne veut pas dire que vous ne devrez pas travailler les auto contrôles, la frustration, l’écoute… Car ils sont indispensables pour que votre chien s’adapte et s’intègre dans notre société humaine. Mais, vous ne pouvez pas, tout le temps museler ce qu’est votre chien, sa nature.

Si vous souhaitez avoir un compagnon heureux, confiant, vous devez lui offrir la possibilité de s’exprimer et de faire ses choix. A vous de trouver les stratégies pour sécuriser ces situations de liberté : prendre le temps qu’il faut, le choix de l’heure de balade, du lieu, des chiens rencontrés, éduquer votre entourage également (votre chien n’est pas obligé de subir les enfants de la famille, de se faire caresser par tous les invités…).

Expérience personnelle

Une balade organisée de telle sorte à ce que la chienne choisisse où nous allons, et où il faut s’arrêter pour renifler

Notre Dog Team est composée de Lovely, chien loup de saarloos, bonne représentante de sa race. Elle a une réserve marquée vis à vis des humains, met du temps à accorder sa confiance et toute forme de coercition aura un effet néfaste sur sa gestion d’une situation donnée.

Au début de notre relation j’ai appris à porter l’attention à la moindre tension sur la laisse, aux distances entre nous et l’élément perturbateur, à l’intonation de ma voix… Rapidement, et je dois l’admettre, bien contrainte à l’époque, j’ai appliqué la notion de « laisser le choix » par « tâtonnement expérimental ». Car je me suis rendue compte qu’elle en avait besoin pour gérer ses interactions avec son environnement et me faire confiance. Cela a demandé beaucoup de lâcher prise de mon côté : c’est le fameux conflit entre la liberté et la sécurité de ma chienne, évoqué plus haut, qui me souciait.

Cependant, je l’ai vu évolué au fil des années et gagner en assurance. Elle va avoir bientôt 7 ans, et peut maintenant croiser vélos, joggeurs, voitures sans bondir. J’admire même sa capacité d’observation et de réflexion face à de nouvelles situations.

Attention!

La limite est parfois fine entre le respect du choix du chien, notre devoir de l’accompagner à s’adapter de mieux en mieux à son environnement d’humains, et ne pas tomber dans une situation où le niveau de stress de l’animal sera trop haut ! Rappelez vous que le stress n’est pas négatif si l’individu peut retrouver un équilibre émotionnel, après avoir été soumis à un déclencheur. L’expérience devient néfaste si l’état de stress perdure dans le temps et de vient chronique.

Une saarloos en terrasse d’un bar! On sort de la zone de confort mais je veille à ce que la situation ne soit pas ingérable pour le chien

C’est là toute la subtilité de l’éducation canine, et ce qui la rend tellement passionnante. Il faut être patient, progressif, savoir s’adapter et accepter qu’on ne contrôle pas tout. Votre chien appréciera que vous sachiez être OK avec son refus. Et il apprendra qu’il peut compter sur votre écoute en cas de besoin. Paradoxalement, c’est qui le poussera à vous faire confiance lorsque vous lui demanderez de sortir de sa zone de confort.

C’est comme cela que je parviens, parfois, à prendre un verre en terrasse avec Lovely, qu’elle se pose à mes pieds.

Poste d’observation de la situation. Rassurée d’être cachée, mais curieuse tout de même. Ce jour là, elle décidera d’elle même de revenir sur la plage avec nous
Ici, la chienne éprouve le besoin de s’éloigner dans les hauteurs du chemin pour mettre de la distance avec les personnes croisées

Ou lorsque nous sommes en balade, j’accepte de la laisser s’éloigner lorsqu’elle en ressent le besoin. Parfois elle fera un écart de 2 mètres avec la personne que nous croiserons, d’autrefois elle escaladera une petite falaise pour se mettre en hauteur et prendre le temps de l’observation.

A moi de jauger son état émotionnel : parfois j’attends simplement qu’elle redescende et vienne vers moi, parfois si je la sens trop en difficulté, il m’arrive de grimper dans les rochers et de rester avec elle. Je suis intimement persuadée qu’elle apprécie. Objectivement, cela se traduit par le fait qu’elle accepte, après un temps adéquat, de me suivre, redescendre de son perchoir, et de continuer la balade à mes côtés !

En conclusion

Alors à vous de jouer ! Donner un champ d’expression possible à votre chien ! Apprenez lui à se faire confiance et vous faire confiance, en lui laissant le choix !

Pour ceux qui souhaitent aller plus loin, cet article est inspiré de ma lecture du moment, « Comportement et bien être du chien: un approche interdisciplinaire », de Thierry BEDOSSA et Sarah JEANNIN, que je vous conseille vivement. Pour le commander, il vous suffit de cliquer ici.

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